Le secret des bulles d’air piégées dans la glace

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24/03/2025

Une équipe de chercheurs [1] a mis en lumière les mécanismes qui façonnent la forme des bulles d’air emprisonnées dans la glace. Contrairement à l’idée que l’on pourrait se faire de bulles toujours sphériques, leurs travaux montrent que leur apparence dépend d’un équilibre subtil entre la vitesse à laquelle la glace se forme, la tension de surface qui tend à arrondir les bulles (la tension de surface) et la manière dont les gaz se diffusent dans l’eau. Cette étude permet de mieux comprendre les phénomènes qui se produisent lors de la congélation et pourrait avoir des applications intéressantes en climatologie et en science des matériaux.

Pour parvenir à ces résultats, les chercheurs ont mené des expériences en laboratoire en congelant de l’eau contenant de l’air dissous et en observant l’évolution des bulles au fil du processus. Ils ont constaté que plus la glace se forme lentement, plus les bulles s’allongent. Par ailleurs, lorsque l’eau contient beaucoup d’air, des formes plus complexes apparaissent, comme les ice worms, de longues bulles en forme de tubes que les glaciologues connaissent bien.





Ces expériences ont permis aux chercheurs d’élaborer un modèle mathématique élégant et intuitif, capable de décrire avec précision ces transformations. Ce modèle repose sur des équations prenant en compte trois éléments clés : la tension de surface, qui tend à arrondir les bulles ; la vitesse de congélation, qui exerce une pression sur elles ; et la diffusion des gaz, qui permet leur croissance. Facilement manipulable et offrant une interprétation claire des phénomènes en jeu, ce modèle permet de prédire avec précision la forme des bulles.

Ces résultats ne se limitent pas à l’observation des bulles dans la glace. En glaciologie, ils permettraient d’interpréter plus finement les traces laissées dans les calottes polaires, ce qui pourrait aider à mieux comprendre le climat du passé. En science des matériaux, ils ouvrent la voie à la conception de structures poreuses aux propriétés améliorées, par exemple pour la filtration ou l’isolation thermique. Cette recherche pourrait aussi servir en planétologie, notamment pour étudier les surfaces glacées de certaines lunes et planètes.

En mettant en évidence les mécanismes qui influencent la forme des bulles d’air dans la glace, les chercheurs de l’ESPCI Paris - PSL enrichissent notre compréhension des processus de congélation. Leurs travaux ouvrent de nouvelles perspectives pour des applications variées, allant de l’étude du climat à l’innovation en science des matériaux.



 
Références
V. Thiévenaz, J.G. Meijer, D. Lohse, & A. Sauret, On the shape of air bubbles trapped in ice, Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A. 122 (10) e2415027122, https://doi.org/10.1073/pnas.2415027122 (2025).

Contact
Communication scientifique de l’ESPCI Paris – PSL : Paul Turpault paul.turpault (arobase) espci.fr

Notes

[1de l’ESPCI Paris - PSL, en collaboration avec des scientifiques de l’université Twente aux Pays-Bas, de l’institut Max Planck en Allemagne et de l’université de Californie.





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