Corinne Soulié-Ziakovic, chercheuse et directrice des études de l’ESPCI Paris - PSL

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29/01/2024

Corinne Soulié-Ziakovic est chimiste de formation et adepte de la transdisciplinarité. Elle est professeure, dirige actuellement deux thèses de physique et chimie des matériaux et vient de prendre la tête de la Direction des Etudes de l’ESPCI Paris – PSL.

Comment êtes-vous arrivée à l’ESPCI : par choix ou parce que le champ de vos recherches vous y a naturellement conduit ?
Une opportunité ! J’y suis entrée il y a 34 ans juste pour faire ma thèse, et j’y suis restée parce que j’ai trouvé la combinaison enseignement/recherche idéale : apprendre et transmettre. Et c’est encore ce qui me motive aujourd’hui. Je suis restée curieuse.

Être une femme a-t-il parfois été un frein dans votre parcours, ou au contraire un atout différenciant dans un univers masculin ?
Je suis d’une génération où les filles ne faisaient pas d’études longues, et encore moins d’études scientifiques. Quand je suis entrée dans mon école d’ingénieurs, on m’a dit souvent : « Pour quoi faire ? Puisque tu te marieras et tu auras des enfants ? ». En même temps, dans les années 80, les femmes se sont émancipées et pour moi, être une fille n’était pas un critère. Néanmoins, la parité n’était pas un sujet de société, la femme était « libérée », mais uniquement dans ses choix de vie. Être une « executive woman » supposait de choisir sa carrière au détriment de sa vie de famille. Pour ma part, j’ai fondé une famille sans jamais mettre en pause mon métier d’enseignante-chercheuse. Après 30 années de carrière, je n’ai pas le sentiment d’avoir « raté » l’un ou l’autre, même s’il est probable que d’avoir moins ou pas d’enfants m’aurait permis de progresser plus vite et plus loin dans ma carrière.

En tant que nouvelle directrice des études de l’ESPCI, quelle est votre vision de l’enseignement ? Que souhaitez vous faire évoluer ?
Quand, lycéenne, je pensais à mon avenir, j’avais une certitude : tout sauf l’enseignement ! C’est mon expérience pendant ma thèse à l’ESPCI qui m’a appris combien le métier est passionnant : rien ne vaut la lueur de compréhension dans l’œil d’un étudiant. Depuis, j’ai enseigné des disciplines assez variées, de la chimie organique à la cinétique de catalyse. Cette expérience pluridisciplinaire a fondé ma vision de la Science, tant dans ma recherche que dans mon enseignement : chaque discipline peut trouver un écho ou une explication dans une autre. C’est mon message pour les étudiants : être un expert dans son domaine c’est très bien, mais c’est encore mieux de pouvoir comprendre et travailler avec un expert d’un autre domaine. Par ailleurs, face à la nécessaire transition vers une science plus durable passant avant tout par la formation de scientifiques plus responsables, il devenait essentiel d’introduire un parcours « Enjeux écologiques » sur l’ensemble du cycle. Nous travaillons avec les enseignants à ce que ces aspects soient traités dans tous les modules de la formation.

L’ESPCI compte près de 40% de femmes dans ses promotions. Selon vous, comment encourager les jeunes filles à faire des études scientifiques ?
Même brillantes et travailleuses, les jeunes filles hésitent souvent à s’engager dans les filières scientifiques, par crainte de manquer de légitimité dans une ambiance majoritairement masculine. La clé réside selon moi dans la confiance en leurs qualités et capacités, qui doit être encouragée notamment par le milieu familial et les enseignants du secondaire. C’est un processus long, qui passe aussi par un regard différent de la société sur la place des femmes dans la science. Cela vient, peut-être pas assez vite, mais il y a 60 ans, les femmes devaient encore avoir l’autorisation de leur mari pour travailler !

Votre labo est sur le point d’emménager dans le bâtiment flambant neuf, c’est un moment excitant j’imagine ?
Absolument ! J’ai pu visiter le laboratoire que je vais utiliser à partir de mars pour mes TP : je n’ai jamais connu un labo aussi bien équipé, clair, neuf. J’ai vraiment hâte !




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