Par Raphaël Estevez
Laboratoire SIMaP, UMR 5266, Université Grenoble Alpes
Nous présentons une analyse micromécanique de la rupture, intermédiaire entre les approches discrètes avec des modèles moléculaires et les analyses macroscopiques menées à l’échelle d’une structure ou d’une pièce. Des modèles cohésifs sont formulés à partir des observations physiques disponibles éventuellement complétées par des calculs moléculaires pour mimer le mécanisme de fissuration et définir la relation ‘traction-ouverture’ associée. L’intérêt d’une telle approche est de se placer à l’échelle du mécanisme de rupture intervenant et d’incorporer une échelle de longueur intrinsèque dans la description permettant d’aborder des effets de taille, liés la la microstructure ou à la géométrie considérée.
Une telle méthodologie a été mise en œuvre pour la modélisation et la prédiction des caractéristiques de rupture des polymères amorphes solides. Le craquelage étant le mécanisme sous-jacent la rupture, une zone cohésive viscoplastique est proposé, fondée sur des observation du craquelage de Kramer (Adv Polym Sci 1983, 1990). La loi de comportement du matériau sans craquelure, élastique-viscoplastique avec adoucissement et durcissement à mesure que la déformation augmente, est également prise en compte. Dans le cadre d’une analyse locale de la rupture en mode I, nous montrons que la ténacité et le taux de restitution d’énergie sont gouvernés par la compétition entre les échelles de temps associées au craquelage, à la déformation plastique et à la vitesse de chargement, conduisant à des propriétés de rupture dépendantes du temps. Des prédictions quantitatives sur le PMMA ont ainsi été obtenues, en bon accord avec l’expérience.
Dans le cas d’essais ‘rapides’ de traction ou de flexion à 1-5m/s, des effets de température apparaissent et une analyse thermomécanique est nécessaire. L’élévation de température conduit à une variation de la condition de rupture locale. Cette dernière est responsable de l’augmentation de ténacité observée à mesure que la vitesse de chargement augmente, pour un temps de rupture voisin de la milli-seconde.
Des travaux récents associant mesures des champs de déplacement par corrélation d’images au voisinage d’une entaille et modélisation permettant une identification de modèle cohésifs seront présentés. Un exemple sera donné pour le PMMA ainsi qu’une identification du comportement de l’interface d’un assemblage collé.