Des réseaux de canettes de soda pour imaginer de nouvelles super-lentilles

03/09/2015

Que se passe-t’il lorsqu’on souffle dans une canette de soda ? un son presque pur est émis, signature d’une interaction résonante avec le son. A une échelle différente, un phénomène analogue se produit lorsqu’une onde lumineuse interagit avec un matériau. L’interaction dépend alors de deux critères : la composition chimique du matériau et sa structure à l’échelle atomique.
Des chercheurs de l’Institut Langevin (ESPCI ParisTech, CNRS) se sont appuyés sur une expérience originale utilisant des canettes de soda disposées en nid d’abeille pour créer une super-lentille acoustique. Leurs travaux, publiés dans la prestigieuse revue Nature le 4 septembre, ouvrent de nouveaux horizons de recherche dans le domaine des matériaux composites.

Photographie du réseau en nid d’abeille « d’atomes acoustiques » (© Institut Langevin, BENJAMIN BOCCAS)

Durant les 30 dernières années, de nouveaux matériaux composites ont vu le jour, chacun référant à l’un des paramètres élémentaires de la matière : les cristaux photoniques / phononiques qui s’appuient sur la structuration de la matière, et les métamatériaux, dont les propriétés découlent de leur composition. Ces deux familles avaient toujours été considérées comme exclusives jusqu’à aujourd’hui. En effet, contrairement aux cristaux photoniques, les métamatériaux sont organisés à une échelle bien plus basse que leur longueur d’onde de réponse, si bien qu’il était admis que leur structure ne modifiait pas la propagation des ondes. Dans leurs travaux, Kaina et al. démontrent que des propriétés propres aux structures cristallines peuvent être obtenues en adaptant la structure de métamatériaux. Ils ont montré que des phénomènes de diffusion sur de petites distances existent, et affirment l’importance de la structuration dans les métamatériaux. Afin d’illustrer leurs propos, les chercheurs se sont en particulier intéressés au phénomène de « réfraction à indice négatif ». En pratique, il s’agit d’observer une onde se propager d’un milieu à un autre (comme un rayon lumineux qui entrerait dans l’eau), et de constater que la déviation du rayon à l’interface est située de l’autre côté de la normale au milieu.

L’équipe a alors mis au point une expérience acoustique élégante pour confirmer leurs prédictions théoriques et numériques utilisant... des canettes de soda.
En organisant un réseau de canettes en nid d’abeille, les chercheurs sont parvenus à réfracter négativement une onde acoustique audible. L’équipe, dirigée par G. Lerosey, a alors proposé la première démonstration acoustique d’une super-lentille exploitant un indice négatif dans les métamatériaux pour contourner la limite de diffraction.

Compte tenu de la généralité de l’approche théorique, ce travail devrait permettre de s’intéresser à d’autres types d’ondes, mais également inspirer les recherches à la fois sur les métamatériaux et les cristaux photoniques / phononiques.

Contact chercheur : Geoffroy Lerosey – geoffroy.lerosey at espci.fr

Negative refractive index and acoustic superlens from multiple scattering in single negative metamaterials, Nadège Kaina, Fabrice Lemoult, Mathias Fink, and Geoffroy Lerosey, Nature

(doi:10.1038/nature14678)

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